Extraits des Affiches du Poitou

Chauvigny Géographie

Mémoire sur la ville de Chauvigny & son Territoire..
Cette ville, divisée en ville haute & en ville basse, est à 5 lieues de Poitiers, 6 de Châtellerault, 4 de St Savin, & 5 de Montmorillon. La ville basse est située au pied d'un ancien Château, où, selon nos Historiens, le Dauphin, (qui fut depuis le Roi Charles V, dit le Sage, & le premier Roi qui ait pris le titre de Dauphin,) se refugia, avec les débris de l'Armée Françoise, après la malheureuse journée de Maupertuis, ou Bataille de Poitiers, où le Roi Jean fut fait prisonnier, le 19 septembre 1356. Ce Château fut presque entièrement détruit dans les dernieres guerres civiles. Il paroit que la ville haute étoit assez bien fortifiée ; ce qui reste de ses fortifications, attire encore l'attention de ceux qui se plaisent à examiner des monuments anciens. Chauvigny est entouré de côteaux ; cette ville est traversée, à l'est, par un petit ruisseau, qui, quoique ne prenant sa source qu'à 300 pas de nos murs, & sortant d'une espece de gouffre, fait tourner cinq moulins, dont 4 sont dans l'enceinte même de la ville, & se jette delà dans la riviere de vienne qui coule sous nos murs.

Il y a dans cette ville 4 paroisses, deux Couvents de filles, des Hospitalieres & des filles de St François, & un Chapitre fondé par les anciens Barons de Chauvigny, vers le huitieme siecle, comme il paroît par les titres & archives de cette Eglise, construite dans le goût de celle de Notre-Dame-la-Grande, de Poitiers. Le Couvent des filles de St François est supprimé, c'est-à-dire, qu'il leur est défendu de recevoir de Novices ; il n'y reste plus que quatre Religieuses très-agées. On espere qu'après leur extinction, l'on y placera l'Hôpital, tenu par les Hospitalieres, filles si utiles à l'humanité, par leur zele pour le soulagement des pauvres & des malades. Elles y seront plus commodément que dans la maison qu'elles occupent. On compte à Chauvigny 425 feux, y compris les Fauxbourgs. A 300 pas de la ville, sur les bords de la Vienne, au sud-ouest, est l'Eglise de St Pierre-les-Eglises, paroisse de 1000 1100 Communiants. Nous sommes entourés de plusieurs autres paroisses très-peuplées, dont les habitants sont laborieux & bons cultivateurs, quoique le terrain soit montueux en plusieurs endroits, & médiocrement bon. La forêt de Chauvigny, longue d'environ une lieue & demie, sur environ 3 quarts de lieue de large, est au levant. Il y a beaucoup de terres à défricher dans cette partie ; cependant ce qui se recueille dans les cantons cultivés, est excellent. Les Boulangers de Poitiers préfèrent notre froment, à celui qui se vend dans les marchés circonvoisins. La principale production du pays est le vin, il est bon & on le conserve longtemps. Des Etymologistes prétentendent que Chauvigny tire son nom des vins que produisent ses côteaux ; Lussas, Montmorillon, le Dorat, &c. s'en approvisionnent chez nous, mais les charrois sont couteux ; si la Vienne étoit navigable depuis Châtellerault jusqu'à Confollens, comme cela est praticable, & comme on en a eu autrefois le projet, ce seroit une grande ressource, une grande facilité pour le commerce, & pour le débit de nos denrées. Je ne parle pas de l'excellence de nos fruits ; de la volaille, du gibier, des truffes que ce pays produit en abondance, ni du poisson de toute espece que nous fournit la Vienne, ni de celui que les Etangs de la Brève, dans le Berry, fournissent à la ville de Poitiers, é que l'on y transporte en passant par Chauvigny. Nous avons marché tous les samedis ; ils tiennent six mois dans la haute ville, & six mois dans la ville basse ; ils sont toujours très-bien approvisionné. Nous avons cinq foires, marquées dans l'Almanach de la Province ; les principales sont celles de St Luc, de St Barthelemi, & de St Pierre. Nous tirons du Berry & du Limousin, des moutons qui properent très-bien dans nos campagnes, couvertes de serpolet, & d'autres herbes propres à la nourriture de ces animaux. Les bœufs nous viennent des foires de Montmorillon, de St Savin, de Lussac & de Plûmartin. Nous avons dans cette ville une manufacture d'étoffe appellée Camelotin, faite de laine & d'étaim ; plus de 30 Maîtres, dont la plupart ont 4 à 5 ouvriers, en font un trafic assez considérable ; & font vivre par là plusieurs familles. Nous avons aussi de bons Chapelliers qui travaillent pour Poitiers, Châtellerault, &c. Parmi les ouvriers d'autres especes, on distingue encore les Menuisiers ; les Seigneurs voisins les emploient avec succès pour les ouvrages les plus délicats, & malgré tous ces moyens, il y a beaucoup de pauvres ; mais la bienfaisance de Mgr l'Intendant leur fournit une ressource ; on les occupe à applanir & à rendre agréables les abords de cette ville, ainsi que les deux places où tiennent nos marchés, & ils sont payés de leur travail. M. Delauzon, Sénéchal & Subdélégué, dont le zele pour le bien public mérite de la reconnoissance, s'est intéressé en bon Citoyen, à leur procurer ce soulagement, qui aide à la subsistance de plusieurs familles devenues indigentes par la dureté des dernieres années. Nous espérons qu'ion voudra bien ensuite faire accommoder notre pont, qui se dégrade, la pierre est très-commune sur le lieu. Ce travail est d'autant nécessaire, qu' Chauvigny est sur la grande route du Berry, & le passage des troupes qui se rendent des provinces occidentales dans les provinces intérieures. Il faut ajouter que le climat de cette contrée est très-sain, & qu'on y voit plusieurs Octogénaires.
ADP, n° 28, du 15 juillet 1773, page 110

La fille à 23 doigts

AVIS DIVERS
La nommée Marguerite Micheau, de la paroisse de Marnay, près Vivonne, est accouchée dans les premiers jours de Juin, d'une fille qui a six doigts bien séparés à chaque main, & six aux pied droits. Cette enfant jouissoit encore d'une bonne santé le 24.
ADP, n° 28, du 15 juillet 1773, page 112

Observations

Marnay – BMS 1772-1784, p. 10 :
Le 25 mars 1774, baptême de Marie Micheau, fille de Jacques Micheau, journalier et de Marguerite de l'Etang. Elle est décédée à Marnay le 15 avril 1775 (base GE86).

Grêle sur le Bas Poitou Météo

AVIS DIVERS
Nous avons reçu le détail de l'orage, qui la nuit du 17 au 18 de ce mois, a dévasté une contrée du Bas Poitou. Le soir du 17, vers le 2 heures le Ciel se couvrit d'un nuage le plus obscur, & bientôt l'Athmosphere parut toute en feu. Les éclairs multipliés, qui frappoient la vue, sembloient annoncer le malheur qui accabla ce canton quelques heures après. Cependant le Ciel se découvrit, les éclairs cesserent vers les cinq heures ; mais ce ne fut qu'une treve ; sur les dix heures, le Ciel se couvrit encore, les éclairs recommencerent ; tout le monde étoit dans l'effroi, dans la consternation. Un des nuages, qui avoit sa direction du sud-ouest au nord-est, s'ouvrit sur une partie de la paroisse de St Maurice des Noües, & accabla ce terrain d'une grêle dont les grains étoient plus gros que des œufs ; il en existoit encore le 22 des tas de cette grosseur. Plusieurs autres paroisses ont essuyé le même accident, entr'autres, Antigné, la Châtaigneraye, la Tardiere, le Breuil-Barret, St Pierre-du-Chemin, la Forêt-sur-Sevre, la Ronde, &c. On comptoit sur une récolte abondante ; on en avoit besoin, les bleds sont hachés, la paille est broyée dans les champs. La misere va être au comble, les propriétaires sont hors d'état de soulager le peuple. Les ceps de vignes sont tellement rompus qu'il faudra plus de deux ans pour les mettre en état de produire ; la grêle nuit toujours beaucoup à cette plante. Les abres ont été dépouillés de toutes leurs feuilles ; & toutes les branches de l'année sont brisées. Il y a eu des bestiaux de tués, & on a trouvé plusieurs oiseaux morts, ainsi que d'autres pieces de gibier. La désolation est générale dans cette contrée.
ADP, n° 31, du 5 août 1773, page 123