Extraits des Affiches du Poitou :
Triplés à Bonneuil-les-Mauges, et centenaire ailleurs.
On écrivoit du Haut-Poitou, le 18 janvier, qu'une jeune femme, nommée Lamberton, de la paroisse de Bonneuil-les-Mauges, étoit accouchée de trois garçons, dont deux vivoient ; & qu'un vieillard d'une autre paroisse, nommé Pierre Bosseboeuf, âgé de 87 ans, venoit d'avoir la petite vérole, dont il s'étoit très bien rétabli.
ADP - n° 6 du 10/02/1774, p. 24
Commentaire : je n'ai pas retrouvé le lieux : Il n'y a pas de baptêmes correspondant à Bonneuil-Matours entre août 1773 et le 28 janvier 1774.
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Les dangers de l'allaitement par les nourrices.
Ecrit des environs de Sauzé.
Il vient de se passer dans ce canton un événement qui doit effrayer toutes les mères qui ne nourissent pas elles-mêmes leurs enfans. Une femme a perdu subitement deux enfans qu'elle avoit, & dont elle en alaitoit un ; ils sont morts d'une maladie dégoûtante, qui s'est compliquée avec la petite vérole. Cette femme surchargée de son lait, & souffrante, prie une petite fille de 10 à 12 ans de la téter pendant quelques jours pour la soulager ; elle ne le fait qu'une fois, c'en fut assez, c'en fut trop ; aussi-tôt cette petite fille victime de sa complaisance, a tous les symptômes & les douleurs de la maladie qui a fait périr les deux enfans ; elle est à toute extrémité, on ne croit pas qu'elle en revienne ; son état excite à la fois la pitié et l'horreur ; d'où il faut tirer cette conclusion nécessaire ; ou la nourice avoit déjà elle-même le sang corrompu, ou c'est l'enfant qu'elle alaitoit, qui, à raison de sa maladie, l'a ainsi viciée en la tétant. De quelque façon que ce soit, il est toujours sûr, que la fille de 12 ans, qui a reçu son lait, a pris en peu d'heures la communication de ce venin. Elle jouissoit d'une bonne santé, elle paroissoit très saine, & elle va périr. Combien d'enfans, combien de meres empoisonnée, de cette maniere ! Cet évênement est à la fois un avis pour les meres & pour les nourices.
ADP - n° 7 du 17/02/1774, p. 24
Commentaire : Beurk
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Le loup d'Aubigné. – Histoire à épisodes
1)
Lettre écrite des environ de Melle, le 15 décembre
Il y a eu le 12, dans la paroisse d'Aubigné, un événement bien fâcheux. Un Laboureur, nommé Verneuil, a été grièvement mordu à une main par un loup que l'on soupçonne d'être enragé, & malheureusement encore, c'est un père de famille chargé de sept enfans, tous en bas âge. Ce loup sorti de la forêt d'Aunay, s'approchoit d'un troupeau de moutons gardé par les enfans de ce Laboureur, qui, craignant pour eux, courut pour les défendre, armé seulement de son aiguillon, (gaule dont se servent les Bouviers pour conduire leurs bœufs,) le loup ataque cet homme & lui saute au corps ; mais cet homme, sans s'effrayer, a le courage & l'adresse de saisir le loup, de lui mettre la tête sous son bras, & de le terrasser. L'homme & le loup se débattirent long-temps ; mais l'homme eût nécessairement succombé, si à ses cris, & à celui de ses enfans, il ne fût survenu un autre homme qui assomma le loup avec une bèche qu'il avoit à la main, dans les bras même du premier. Cet homme digne d'exciter la commiseration publique, a été conduit, le 14 à Confollens, auprès d'une personne charitable, qui a réussi plusieurs fois à prévenir la rage sur des personnes mordues par des animaux qui en étoient atteints. Cette Province très couverte de bois en plusieurs contrées, sert de retraite à un grand nombre loups (sic), qui, de temps en temps, font des ravages sur les hommes & sur les bestiaux. La multiplicité de ces accidens, devroit bien faire prendre les moyens de chercher à les détruire. Les Seigneurs devroient particulièrement s'occuper de cette chasse ; l'intérêt général de la société le recommande à leur humanité & à leur intérêt propre.
ADP - n° 52 du 30/12/1773, p. 210
2)
Nous avons reçu de nouveaux détails sur le triste accident arrivé dans la paroisse d'Aubigné, le 12 Décembre. Le loup étoit chassé par des hommes & par des chiens ; le Laboureur dont on a parlé, laisse sa charrue & accourt à ce bruit ; il voit le loup se portant vers lui même, il le frappe de son aiguillon ; le loup écumant, & après en avoir mordu le bout pendant quelques instants, s'élance sur lui, lui fait des égratignures au visage & au ventre, & se fixe enfin sur une de ses mains, lui casse un doigts & lui fait plusieurs morsures, dont les plaies sont transversalles. Cet homme robuste & courageux, saisit le loup, comme on l'a dit ; un autre homme survient & tue cet animal avec un bèche ou piarde. C'est le Sacristain de la paroisse d'Aubigné, nommé Simon Merleau ; il en porta la tête à M. Gilbert, Subdélégué, de Chef boutonne, qui lui donna la somme de dix livres, pour sa récompense, acordée par le Gouvernement en pareil cas ; c'étoit une bête monstrueuse. La même contrée éprouva en 1766, de la même manière, des malheurs plus cruels encore ; il y eût plusieurs persones qui furent mordues & qui périrent.
ADP - n° 1 du 06/01/1774, p. 2
Commentaire : le sacristain a sûrement partagé la prime ! (???)
3) Il y avait aussi des râleurs à l'époque :
Lettre écrite du Haut-Poitou.
Vous avez annoncé, M., l'accident arivé dans le voisinage de Chef-Boutonne, & la précaution qu'on a prise d'envoyer le vainqueur du loup chez des persones qui, dit-on, ont un secret pour guérir ou pour prévenir l'Hydrophobie. A cette occasion, M., ayez la bonté de porter plainte au public contre ces possesseurs de secrets, qu'il seroit si avantageux de répandre. Les Charlatans ont les leurs, que les gens éclairés ne leur envient point ; mais comment des persones qui ne retirent de leur recettes que le plaisir touchant de soulager l'humanité souffrante, peuvent elles se résoudre à les tenir secrettes ? Ont-elles fait réflexion que leurs remedes rendus publics, peuvent sauver la vie à mille individus, qui périront avant de savoir la demeure ou même l'existence de celui qui tient en ses mains le secret de leur guérison. En supposant même que l'intérêt eût quelque part à la conservation de ces secrets dans les familles, le Gouvernement ne pouroit-il pas, après avoir constaté l'efficacité du remede, récompenser ceux qui feroient à la société un sacrifice aussi utile ? Il y a dans le voisinage une famille qui possede le secret d'un onguent, propre non-seulement à prévenir la gangrene, mais encore à en arrêter les progrès, & à séparer très proprement les chairs gangrenées d'avec les parties saines. Il y a des exemples de malades, à qui cet onguent a sauvé des membres condamnés à l'amputation par les Maîtres dans l'art de guérir. Mais combien de malheureux ont succombé aux suites funestes de cette redoutable maladie, pour n'avoir pas été à portée de connoître les possesseurs du secret ? Soyez, M., à cette occasion, l'Avocat de l'humanité ; ajoutez ce nouvel article à la liste nombreuse des articles intéressans qui ornent votre Recueil, & qui vous donnent de si justes droits à la reconnoissance de vos compatriotes.
ADP - n° 7 du 17/02/1774, p. 26
4) Mais hélas :
On se souvient de ce malheureux Laboureur de la paroisse d'Aubigné, qui a été mordu par un loup, & dont nous avons parlé. Pour donner plus de moyens à sa famille de le soulager, & pour récompenser en même temps le courage avec lequel il s'est défendu de cet animal, dont il s'est, pour ainsi dire, rendu lui-même la victime, M. l'Intendant, dont le cœur compatissant & généreux, saisit toutes les occasions de faire le bien & de l'encourager, lui a fait donner une somme d'argent. Ce malheureux Laboureur est mort dans le plus déplorable état, quelques soins que l'on ait pris pour le préserver des suites de ce funeste accident. Seroit-il donc vrai, que malgré tant de remedes publiés contre la rage, que malgré que l'on assure si souvent que plusieurs ont réussi, il a été jusques à présent impossible d'en trouver un absolument efficace, que l'on puisse en tout temps employer avec confiance, & s'y fixer ? Si l'on pouvoit cependant y parvenir, quel bonheur pour l'humanité ! Alors les villes, les Seigneurs pouroient, pour sauver de la rage les persones mordues par des animaux qui en sont atteints, former des établissements, comme il commencent à en faire pour rappeler les noyés à la vie.
C'est le vœu, c'est le conseil de l'Auteur citoyen de la Gazette d'Agriculture, & tous les bons cœurs se joignent à lui.
ADP - n° 7 du 17/02/1774, p. 27
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Des quadruplées à Noirmoutier
SINGULARITE NATURELE
Susanne Rousseau, âgée de 42 ans, femme d'Honoré Aubert, Marchand et Laboureur aisé, de l'île de Noirmoutiers, en Bas-Poitou, est acouchée le 28 du mois dernier, de quatre filles, dont une ayant 13 pouces 3 quarts de longueur, & les autres huit, dix & onze pouces ; oelles ont toute jeté un cri en naissant, & ont été baptisées ; elles sont mortes, la premiere, trois quarts d'heure après sa naissance, & les trois autres, à deux, trois & quatre heures l'une de l'autre. Elle (sic) ont été enterrées chacune dans une biere, portées par quatre petites filles vétues en blanc, précédées de tout le Clergé. On n'a pas connoissance de pareil phénomene ici ; on le trouvera d'autant plus extraordinaire, qu'on ne voit pas ailleurs de couches quadruples sans mélange de sexe. La mere n'étoit enceinte que de six mois & demi ; un mois avant d'acoucher, elle passoit pour hydropique & se croyoit telle ; ses grandes douleurs n'ont duré qu'une demi-heure ; elle se porte autant bien que sa situation peut le permettre. (1 Février)
ADP - n° 7 du 16/02/1775, p. 27
Acte de décès :
Le dimanche vingt neuf janvier mil sept cent soixante quinze les corps de quatre filles nées hier matin dans une seule couche … du cimetière baptisées à la maison et mortes sur le champ, issues du mariage d'Honoré Aubert, laboureur, et de Suzanne Rousseau sa femme, de cette paroisse, ont été inhumés au cimetière par nous vicaire soussigné, en présence de Mes Guillaume Le… et Jean-Paul-Armand Delbecq vicaires de cette dite paroisse qui on signé avec nous. En interligne, les mots de cette paroisse approuvés.
AD85 – Noirmoutier-en-l'Ile, BMS 1762-170, vue 344
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Recette contre les charançons.
Secret éprouvé contre les Charensons.
Ce secret annoncé dans la Gazette d'Agriculture, a été eprouvé au mois de Septembre dernier, par M. de Brosse, premier Président du Parlement de Dijon, dans sa terre de Montfalcon, sur l'indication que lui en donna un de ses domestiques, qui l'assura qu'il l'avoit vu pratiquer avec succès en Poitou. Quand on aperçoit des charansons dans le grenier, on jete sur le tas de blé des écrevisses vivantes. On les y laisse crever & pourir. Le grenier doit être bien fermé ; leur corruption y répand bientôt une odeur indifférente pour la qualité du grain, mais funeste aux animaux qui le mangent & qui y font leurs nids. Il est à propos de faire ce remede simple & facile le plus tôt que l'on peut, & dès qu'on s'aperçoit que les animaux se sont nichés dans le blé, où ils font bien vite un assez grand ravage. L'épreuve annoncée réussit même avant que les écrevisses fussent mortes. Quatre heures seulement après qu'on les eût placées dans le grenier, M. le Président de Brosse y étant retourné par curiosité, vit déjà les insectes sortir de toutes parts du blé, & se hâter de fuir, quoique les écrevisses fussent encore vivantes. Ces insectes s'étoient déjà ramassés en quantité sur les murs du grenier qui en étoient tous noirs en plusieurs endroits, cherchant par les fentes & les petits trous, à s'échaper en dehors,où le soleil & le grand air les font bien vite crever : au bout de deux ou trois jours on n'y en vit plus.
ADP - n° 7 du 15/02/1776, p. 27
Commentaire : les fabricants de pesticides ont trouvés la parade : ils font crever les écrevisses des ruisseaux, qui leur font concurrence, pour que les agriculteurs utilisent leurs produits.
Pour ma part, je raffinerais le système, en récupérant les écrevisses encore vivantes, à des fins de consommation personnelle, quitte à en remettre d'autres dans le grenier.
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L'amour conserve
L'année derniere, auprès de Bressuire, une veuve, âgée de 84 ans, épousé un jeune homme de 23. On mande des environs de l'Ile-Jourdain, qu'un homme veuf depuis trois semaines, & âgé de 98 ans, a épousé, de 3 de ce mois, une fille de 25. Auprès de Partenay, un aveugle de naissance, âgé de 61 ans, a épousé le 23 Janvier, une fille de 24.
ADP - n° 7 du 15/02/1776, p. 28
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Record de fécondité.
Singularité Naturele
Il y avoit l'année derniere chez M. Dupuy, Trésorier de France, à Poitiers, une servante nommée N. Gouttiere, âgée d'environ 24 ans, dont la mère, vivante & actuèlement à l'Hôpital Général de cette ville, a eu trente six enfans du même mariage. C'est le seul enfant qu'elle ait nouri de son lait, & qui a survécu à tous les autres, qui sont tous morts sans parvenir à un âge avané. Le pere étoit Chaudronier à Mirebeau. Il y a dans cet événement trois remarques intéressantes à faire. 1°, La fécondité de cette femme ; 2°, que l'enfant qu'elle a alaité soit précisément celui qu'elle a conservé : ce qui atteste encore combien il seroit avantageux à la population que toutes les meres en fissent autant ; 3°, & cette derniere observation est triste, que cette mere, sans le secours de l'Hôpital, eût sans doute été obligée de mandier son pain dans sa vieillesse, malheur qui arive au plus grand nombre des persones du peuple à cet âge : ce qui prouve en même temps l'utilité des Hôpitaux & la dureté des cœurs.
ADP - n° 1 du 02/01/1777, p. 3
Rectificatif
De Poitiers, le 6 Janvier (1777)
Vous avez été mal informé, M., sur quelques circonstances du phenomene naturel que vous raportés, Aff. Du 2 de ce mois. Il est sans doute peu intéressant de savoir que Jeanne Gouttiere n'a que 19 ans au lieu de 24 ; que Louis Gouttiere son pere, né à Jaunais, & mort il y a 10 à 11 ans à Mirebeau sur la paroisse de Notre-Dame, fut Potier & non pas Chaudronier ; qu'il avoit 32 ans lorsqu'il épousa Marguerite Chabrut, actuèlement sa veuve, qui n'en avoit alors que 15. Tout le phénomene, & c'en est un effectivement, se réduit à la fécondité de cette femme qui a eu 24 garçons & 8 filles ; & qui a fait 4 fausses couches. Plusieurs de ces enfans ont vécu jusqu'à 18, 20 & 23 ans. Il y en a eu 18 vivans à la fois. Mais elle n'a alaité aucun de ses enfans, pas même la fille qui survit seule à une famille si nombreuse. La curiosité m'a porté à aller moi-même interroger cette femme à l'Hôpital où elle est. Elle est extrémement sourde ; elle se dit âgée d'environ 62 ans. (Signé, Dupuy, Etudiant en Droit.)
ADP - n° 4 du 23/01/1777, p. 15
Commentaire :
Un peu trop gros pour être crédible. Nous avons donc fait une petite recherche sur les relevés paroissiaux de Notre Dame de Mirebeau.
Louis Gouttière, marchand poêlier s'est marié avec Marguerite Chabrut, le 15 février 1729. Ils ont eu (o = naissance, b = baptême, (+) = inhumation) :
Françoise b 02/03/1730 BMS-1730-1739, p. 3
Charles Louis ob 21/02/1731 BMS-1730-1739, p. 14
Anne ob 06/03/1732 BMS-1730-1739, p. 26
Louis Michel ob 19/08/1733 BMS-1730-1739, p. 41
Catherine b 15/10/1735 BMS-1730-1739, p. 65
(+) 24/10/1758 M. ND BMS-1750-1758, p. 106
Louis Charles o le 29, b 30/04/1737 BMS-1730-1739, p. 81
Charles ob 08/07/1738 BMS-1730-1739, p. 94
Jean ob 29/04/1740 BMS-1740-1749, p. 7
François ob 19/04/1741 BMS-1740-1749, p. 20
Françoise ob 09/08/1742 BMS-1740-1749, p. 31
Georges ob 28/10/1746 BMS-1740-1749, p. 71
(+) 26/11/1746 BMS-1740-1749, p. 72
Etienne ob 07/05/1748 BMS-1740-1749, p. 87
Jeanne ob 08/09/1749 BMS-1740-1749, p. 101
2 jours : (+) 14/09/1749 BMS-1750-1758, p. 3
Marie Marguerite o 01/12/1750 BMS-1750-1758, p. 8
Louise (= Marie) Marguerite
ca 1 mois (+) 10/01/1751 BMS-1751-1767, p. 7
Jean ob 26/04/1752 BMS-1751-1767, p. 12
(+) 27/04/1752 BMS-1751-1767, p. 18
Jeanne ob 14/04/1755 BMS-1751-1767, p. 46
Ce qui fait 16 enfants (9 garçons et 7 filles), dont seuls 4 n'ont pas vécu plus de 5 semaines.
Louis Goutiere, Marchand « poitier », âgé d'environ 55 ans, a été inhumé le 03/10/1758 Mirebeau ND (BMS-1750-1758, p. 106).
Jeanne Goutière s'est mariée avec Charles Blondet, maréchal, le 1er juin 1779, à Migné-Auxance. (BMS-1771-1782, p. 124).
Marguerite Chabrut est décédée le 11/08/1781 à l'Hôpital Général de Poitiers, dans le cimetière duquel elle a été inhumée le lendemain (S-1770-1792, p. 17).
16 enfants ce n'est déjà pas si mal, et mérite le prix Cognacq-Jay.
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