Extraits des Affiches du Poitou

Carrière de marbre

M. le Marquis de Cerzé, Seigneur du Château de la Bonardelliere, en la Paroisse de Saint Pierre d'Exideuil, près Civray, vient de découvrir dans sa terre, une carriere de marbre, que l'on assure pouvoir être comparé au plus beau marbre de Grece & d'Italie. Nous n'avons point encore d'autres renseignements sur cette découverte précieuse, que nous nous empressons d'annoncer. On se souvient des mines d'antimoine & d'ochre, trouvées depuis peu dans le Ba-Poitou. Ainsi la Providence, toujours bienfaisante, nous offre de temps en temps de nouvelles richesses ; il n'est question que de creuser la terre.

Cette semaine, je vous recommanderai de jeter un œil sur les articles parus dans les ADP du 4 avril au 27 juin 1782, vues 2 et 3, sous le titre « L'antiméphitique ». Vous y verrez quelques savants messieurs inclinés sur les tinettes ! Les articles sont trop longs pour être recopiés ici.

Une centenaire

La nommée Françoise Bodin, veuve en troisiemes noces de Pierre Multeau, Maréchal au village de Pressac, paroisse de Jadres, à une lieu de Chauvigny, est morte depuis peu, âgée d'environ 105 ans, sans avoir eue jamais aucune maladie, pas même la petite vérole, ni la rougeole. Son premier état, jusqu'à l'âge de 25 ans, a été celui de Couturere, & depuis jusqu'à l'âge de 102 ans, elle n'a exercé que celui d'accoucheuse. Elle n'a eu d'autre infirmité pendant toute sa vieillesse qu'un peu de surdité. Elle n'est morte que parce que la nature défailloit, & sans douleur ; elle travailloit encore 10 jours avant sa mort, & elle a joui de toute sa raison jusqu'au dernier moment.
Affiches du Poitou, n° 15, du 15 avril 1773, page 60

Extraits du Portefeuille des Dames

La guerre bactériologique

Nouvelles de l'intérieur Des lettres de Vienne annoncent que Sidney Smith prépare dans ce moment-ci à Constantinople des embarquements de pestiférés qu'il se propose de diriger en Italie, et sur-tout dans quelques parties de l'ex-royaume de Naples, afin de se défaire, par les ravages de la peste, des Français et des Italiens attachés au gouvernement républicain. Non-seulement il envoie des hommes affectés de cette maladie, mais il a pris encore l'horrible précaution de transporter avec eux des effets qui ont été à l'usage de quelques personnes mortes de la peste, afin d'inoculer cette affreuse maladie dans les beaux pays d'Italie, et se procurer l'atroce plaisir de lui voir faire les mêmes ravages dans les contrées qui avoisinent le sol habité par les Français… . On refuserait de croire à cette nouvelle horreur, si on l'attribuait à un autre qu'à Sidney Smith.

Le noyé de Léray

Civray, le 27 février 1773.
Vous frémirez, Monsieur, vous vous affligerez en lisant le récit que je vais vous faire. Je n'aurois jamais osé l'écrire, s'il ne donnoit pas lieu à des réflexions que les amis de l'humanité peuvent faire valoir pour détruire un préjugé funeste & meurtrier qui regne encore dans nos campagnes. Un jeune homme de 21 ans, & son épouse du même âge, tous deux de la physionomie la plus intéressante, & mariés depuis six mois, vinrent il y a quelques jours se louer pour valet de chambre & pour femme de chambre, chez M. de Jousserant de Lairé, Gentilhomme respectable, d'une des plus anciennes maisons du Poitou, demeurant au Château de Lairé, sur les bords de la Charente, à trois quarts de lieue de cette ville.

Extraits du Portefeuille des Dames

Les artificiers amateurs

EVENEMENT Châtellerault, 10 ventôse an 8. La poudre à canon coûta la vie à celui à qui l'invention en est due. Combien de victimes ne pourrait-on pas compter parmi ceux qui ont voulu faire des essais sur une matière qui présente peut-être encore le problème à résoudre, de savoir si sa découverte a fait plus de bien que de mal à l'espèce humaine !

Le vieux tombeau

On vient de faire à Targé une découverte qui peut exciter l'attention des curieux. Le 11 de ce mois, en creusant dans le cimetiere pour faire une fosse, le fossoyeur crût reconnoitre que le terrain n'étoit pas solide : ce qui l'engagea de sonder à quelque profondeur ; il trouva, à 6 pieds, des pierres de taille qui couvroient un tombeau ; il se fit aider pour les lever ; on trouva dans ce tombeau, un squelette, auprès duquel étoit une lampe sépulcrale, d'argile, que l'on a retirée entiere, des lames de fer rouillé & même pouri, & sur une des plus grandes pierres du tombeau, à l'extrémité supérieure, une inscription qui paroît être en caracteres gothiques & que l'on a pu lire, ce qui est fâcheux. Ce tombeau très-pesant a été laissé où il est ; on devroit l'en retirer ; toutes ces indications annoncent qu'il est là depuis plusieurs siecles ; sa forme est ancienne. Il est à remarquer que cet emplacement n'est cimetiere que depuis 1686 ; avant ce temps c'étoit une vigne apartenante à la Cure, à qui M. le Comte de Vihers, alors Seigneur de Targé, donna une piece de terre, pour changer l'emplacement du cimetiere qui l'incommodoit. Certainement ce tombeau étoit dans ce terrain, avant qu'il fût converti en cimetiere… Vous devriez, M., engager MM. de G., qui reçoivent vos Feuilles Hebdomadaires, à vous adresser quelques éclaircissemens sur des vestiges de retranchemens qui sont peu éloignés de le Château de la Tour d'Oiré, & que l'on appele les Fossés-Goués ; ainsi que sur la masure nommée le Vieux-Poitiers, située à quelque distance du Clain, dans la paroisse de Cenon, sur laquelle tant d'Auteurs ont écrit avec tant de diversité. Si ces Messieurs ne peuvent rien vous dire de satisfaisant sur ces deux objets, il est inutile que vous vous adressiez à d'autres …
ADP - n° 13, du 31 mars 1774, p. 55.

Extraits des Affiches du Poitou


Encore un allaitement fatal.

Lettre écrite du Haut-Poitou
On m'a parlé depuis peu de jours d'une femme qui avoit nouri six enfans de son mariage, & qui les a perdu tous six, à peu près à la même époque, savoir à l'âge d'environ trois ans, par des maladies très-semblables, dont je crois pouvoir attribuer la cause & l'analogie à la mauvaise pratique qu'avoit suivi cette mere, de retirer son premier enfant de nourice, après être accouché du second, & de lui donner un lait que la nature n'avoit pas préparé pour lui. Elle a continué de cette sorte jusqu'au sixieme, sur l'idée qu'elle avoit que son lait étoit dans cette circonstance plus abondant que celui des nourices, & elle a été punie de s'être crue plus sage que la nature. Je viens de m'informer du fait, à cette femme même, qui m'est convenue que ce malheur lui est arivé par son imprudence. Ses six enfans sont morts hydropiques ; le septieme qu'elle a nouri dès l'instant de sa naissance & qui est parvenu à l'époque fatale à ses frères, est dans un état de santé & de vigueur qui confirme les torts de sa mere & justifie ses regrets. C'est l'épouse d'un honête bourgeois de ma connoissance qui consent que l'on publie ce qui lui est arivé, pour avertir peut-être quelques meres, du danger qu'il y a de s'éloigner de la route que nous a tracé la nature.
Affiches du Poitou, n° 9, du 3 mars 1774, page 38

Les mules folles

PHENOMENE ANIMAL
Il est arivé à une foire de Champdeniers, le 5 de ce mois, un événement extraordinaire, qui étoit très-fréquent il y a quelques années. Tout à coup, vers midi, par un mouvement rapide qui dura peu, tous les mulets & mules qui étoient dans cette foire, s'effraierent, casserent leurs licols, se détacherent des mains de ceux qui les retenoient, se débanderent dans le plus grand désordre, mais sans sortir du champ de foire qui est au milieu du bourg, & renverserent & blesserent plusieurs persones. Nous avons été témoin d'un pareil accident il y a quelques années ; ils n'arivent pas seulement à Champdeniers ; il y en eut un à Montmorillon en 1770, suivant une Gazete du Commerce. Il y a une lettre de nous à cette occasion, dans les Affiches de la Rochelle, de 1771. Il en est fait mention dans un mémoire très-intéressant sur le bourg de Champdeniers, que nous venons de recevoir, & que nous publierons incessamment. Ces accidens sont aussi arivés plus d'une fois aux foires du Bas-Poitou ; nous avons une lettre qui en traite, & que nous placerons à la suite du mémoire sur Champdeniers, en rappelant ce que nous avons écrit. Cet objet mérite certainement d'exciter l'attention de tous les citoyens, & pour empêcher que l'accident se répète, & pour détruire les préjugés du peuple, qui ne manque pas, comme on s'en doute bien, de l'attribuer à ce qu'il appele maléfice ou sort.

Extraits du Portefeuille des Dames

Bandit de petits chemins

TRIBUNAL CRIMINEL
Du 18 Brumaire.
Jugement qui condamne à la peine de mort un nommé Demois, des environs de Chinon, convaincu d'avoir attaqué les voyageurs sur les chemins, dans l'intention de les voler, même d'assassiner. Cet homme s'était dégoûté, depuis quelques années, des travaux de la campagne ; il dormait le jour et passer les nuits à voler les bois, les fruits de toute espèce, sur les propriété de ses voisins ; il avait attaqué, le soir, les passans (sic) pour les voler ; mais il n'avait pu y parvenir ; ils s'étaient défendus et avaient pris la fuite. Il avait associé à ses crimes sa femme et son enfant âgé de huit ans ; il était devenu le fléau de son canton. La loi punit en ce cas la tentative comme l'effet même. Un jugement du tribunal de Tours, qui avait été cassé par un défaut de forme, l'avait aussi condamné à mort.
Portefeuille des Dames, n° 6, du 30 brumaire an 8, page 5 du suppl.